• Femme versant à boire .

    Femme versant a boire .

    Peinture de Julien Dupré  (1851 - 1910)
     

     

    Femme versant à boire .


    La fourche et le râteau, la faux sous le soleil
    Arrosant de son feu le champ jonché de meules,
    Flots de sueur et soif, dos meurtri, jambes veules,
    Bras noués, gros chapeau couvrant le front vermeil.

    Il s'assoit, sur un tas, et tend une timbale
    Que sa femme remplit en vidant son cruchon.
    Docile des sabots à la tête en fanchon,
    Elle sert, avec l'eau, l'amour qu'elle trimballe.

    Les labeurs de la vie ont en ces lieux ruraux
    Leur boulet mais aussi la bonne récompense:
    Cueillettes et moissons, et surtout l'existence
    Loin des tracas des tours aux cages à barreaux.

    Ô Dupré, ce moment que ta savante brosse
    Avait, tel quel, rendu témoigne du grand art
    Dont tu devais hisser le brillant étendard
    De la peinture qui, de toi, fit un colosse.

    Les braves paysans que tu faisais bouger,
    Par tes coups de pinceau, revivaient sur tes toiles,
    Pleins de force, d'espoir, croyant en leurs étoiles,
    Tous au travail,soit-on grand fermier ou méger.

    Cet agreste univers, par sa poule et sa vache,
    Fut la source limpide où ton attachement
    Au Beau trouvait le grain, le foin, l'air fraîchement
    Parfumé de pain chaud, de senteur de goulache.

    Je te rends, par ces vers, en toute humilité,
    Cet hommage éclatant que ma flûte champêtre
    Au chant de rossignol hérité d'un ancêtre
    Confie au doux zéphyr par un matin d'été.


    Femme versant a boire .


     Mohammed ZEÏD
      
     




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  •  
    La liseuse

     

    Peinture de J-H. N. Fragonard (1732 -1806 )  reproduite par Claudie
      

    La liseuse

     
    Tout près de la fenêtre instillant la lumière
    Dans son réduit silencieux d'ombre ouaté,
    Elle suit du regard les mots ayant flatté
    Son âme que l'écrit, tel un psaume, sidère.

    Le bel éclat du jour que le jaune citron
    De sa robe reflète en douce nitescence
    Sur son front innocent confère à sa jouvence
    Un attrait de sylphide en chemise à plastron.

    Les flambantes couleurs et la fine dentelle,
    Les rubans violets, le mignon chignon haut,
    Vous diraient, d'une voix de sagace héraut,
    Que la fille inconnue allait être immortelle.

    L'illustre peintre a su, par ses jeux de pinceaux,
    Conter l'envoûtement qu'exerce la lecture
    Sur le cœur qui jouit, sur l'esprit qui pâture
    Dans le pré du recueil déployant ses ruisseaux

    Claudie, en imitant Fragonard à la brosse
    Magique, tu ressors son art très raffiné.
    Ce portrait que ta main d'esthète a câliné
    Est rené car, pour toi, peindre est un sacerdoce.

    Toi qui prônes le beau, veuille accepter ces vers
    Qui, je l'avoue, ont une apparence sans grâce.
    Le verbe et le motif : fantaisie où s'enlace
    L'envers peu reluisant au lumineux avers.


    Mohammed ZEÏD

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  • La fille au chat  



    Tableau d'Auguste Renoir (1841 - 1919 )



    Béni sois-tu, grand Roi ! ton art prodigieux
    Dut soûler de plaisir ce mignon petit fauve
    Au regard fascinant, au ronron spongieux,
    À l'aise dans les bras d'une fille d'alcôve.

    Se griser du parfum d'une nymphe au regard
    Si doux est un soulas pour la bête tigrée
    Qui se laisse chérir
    fuyant le vent hagard
    De la rue où l'on crie, où l'on râle et maugrée.

    La jeune vénus tient tendrement l'animal
    Comme une mère prend avec douceur son ange
    Pour le faire rêver d'un azur baptismal.

    Ce merveilleux amour, nul bruit ne le dérange,
    Nul être n'en détruit le fil d'or attachant
    Ces deux beautés que fait valser le même chant.


    Mohammed ZEÏD


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  • Alphonse de Lamartine



     Artiste : Henri Decaisne (1799 - 1852)

    Ô chantre de l'amour, ton heureux lévrier
    Du regard te fixant, cherchait-il en ton âme,
    Pour y goûter, le pur, le céleste dictame
    Dont tu daignais remplir ton auguste encrier ?

    Ta plume fit reluire, au fil de ta pensée,
    L'horizon bleu des vers admirés par Victor
    Qui déclama tes mots de sa voix de stentor
    Ravi qu'il fut par leur beauté bien cadencée.

    L'autre limier, flairant dans le vent la senteur
    De l'encens que fleurait ton étoffe royale,
    Espérait, queue en l'air, de ta paume loyale,
    Une longue caresse, une tape en douceur.

    Ton bel accoutrement, digne de ta sveltesse,
    Dut astreindre le peintre à sortir tout son art
    Pour accorder la vie à ce fruste savart
    Qui, du coup, par ta grâce, oublia sa tristesse.

    Le ciel, si gris soit-il, point ne put obscurcir
    Le recueil où "Le lac", en effleurant ses rives,
    Parlait à la forêt, aux jardins et leurs grives,
    Aux monts bravant le temps n'osant les amincir.

    J'applaudis en rythmant : gloire à Henri Decaisne,
    À son pinceau doré qui nous permit de voir
    Le maître de la lyre ayant, son bon savoir,
    Légué, sans rien celer, à toute âme sereine



    Mohammed Zeïd


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  • Les glaneuses



    Jean-François Millet (1814 -1875)



    Les gaillards moissonneurs ont émoussé leurs faux
    Dès que s'était levé le jour pour mettre en bottes
    Les blés qui, déjà mûrs, inclinaient leurs pâlottes
    Tignasses vers le sol sans cailloux ni tuffeaux.

    On transportait cet or en formidables meules,
    À bord de gros fardiers tirés par des rossards
    Vers les aires à battre où d'autres vieux toquards
    Devraient être attelés pour se rendre aux éteules.

    Sous le soleil ardent, des glaneuses allaient,
    À petits pas, les dos courbés, parmi les chaumes,
    Pour un grain, quelque épi...Ces filles des royaumes
    De Misère, cent faims, sans fin, les harcelaient.

    Combien dure est la vie, amères sont les miches
    Pour ces gens à la peau tannée, au souffle court,
    Dont le ciel, toujours gris, semble demeurer sourd
    Aux cris de leurs enfants entassés dans les niches !

    Ô terre, nourris-tu les nantis et les gueux
    Du même sein ? Mille fois non ! pardi! blâmable
    Est ton partage mais, vois-tu, n'est condamnable
    Que le riche à l'aspect horriblement rugueux.




    Mohammed Zeïd


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