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À chacun son chemin.
On ne lit pas ; on s'ébahit devant les nus.
Images et photos, tableaux et pellicules,
Étalages d'appas...Gaspillez vos pécules
Afin de vous gaver de clichés inconnus !
L'amour virtuel a, sauf chez les abstenus,
Son azur, son envol, ses jolis crépuscules
Et ses intimes soirs où les plâtrés hercules
Déchaînent aux écrans leurs esprits malvenus.
Les vils éclairs ont détrôné les belles lettres.
Le papier, inhumé, n'ouvre plus ses fenêtres
Donnant sur les jardins des arts éducateurs.
C'est l'ère du néon; ça brille, ça clignote.
Fi donc si vous muez en tête de linotte !
Je suis le bon chemin des antiques lecteurs.Mohammed Zeïd
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Promenade
La vie herbe des champs et la joie une fleur.
Que faire alors : m'étendre ou cueillir l'anthyllide
Qui sourit au soleil ? Cette grâce a valeur
D'or à mes yeux que je repais de ciel limpide.
Non, je n'ose infliger quelque horrible douleur
À ce joyau brillant dans l'air encor humide !
Au loin, s'entend le cri d'un gai bouvreuil siffleur.
Je réponds à l'appel. Mon esprit se débride.
Un arbre s'étirant de tous ses rameaux verts
M'invite à m'éjouir, à son ombre, des vers
Du Maître, en feuilletant " Les chants du crépuscule".
"La pauvre fleur" me fit plonger dans un penser
Si noir que pas un rai ne peut le transpercer.
La nuit vient recouvrir les bois du monticule.Mohammed ZEÏD
Flormed
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Alphonse de Lamartine
Artiste : Henri Decaisne (1799 - 1852)
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Ô chantre de l'amour, ton heureux lévrier
Du regard te fixant, cherchait-il en ton âme,
Pour y goûter, le pur, le céleste dictame
Dont tu daignais remplir ton auguste encrier ?
Ta plume fit reluire, au fil de ta pensée,
L'horizon bleu des vers admirés par Victor
Qui déclama tes mots de sa voix de stentor
Ravi qu'il fut par leur beauté bien cadencée.
L'autre limier, flairant dans le vent la senteur
De l'encens que fleurait ton étoffe royale,
Espérait, queue en l'air, de ta paume loyale,
Une longue caresse, une tape en douceur.
Ton bel accoutrement, digne de ta sveltesse,
Dut astreindre le peintre à sortir tout son art
Pour accorder la vie à ce fruste savart
Qui, du coup, par ta grâce, oublia sa tristesse.
Le ciel, si gris soit-il, point ne put obscurcir
Le recueil où "Le lac", en effleurant ses rives,
Parlait à la forêt, aux jardins et leurs grives,
Aux monts bravant le temps n'osant les amincir.
J'applaudis en rythmant : gloire à Henri Decaisne,
À son pinceau doré qui nous permit de voir
Le maître de la lyre ayant, son bon savoir,
Légué, sans rien celer, à toute âme sereine
Mohammed Zeïd
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Les glaneuses
Jean-François Millet (1814 -1875)
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Les gaillards moissonneurs ont émoussé leurs faux
Dès que s'était levé le jour pour mettre en bottes
Les blés qui, déjà mûrs, inclinaient leurs pâlottes
Tignasses vers le sol sans cailloux ni tuffeaux.
On transportait cet or en formidables meules,
À bord de gros fardiers tirés par des rossards
Vers les aires à battre où d'autres vieux toquards
Devraient être attelés pour se rendre aux éteules.
Sous le soleil ardent, des glaneuses allaient,
À petits pas, les dos courbés, parmi les chaumes,
Pour un grain, quelque épi...Ces filles des royaumes
De Misère, cent faims, sans fin, les harcelaient.
Combien dure est la vie, amères sont les miches
Pour ces gens à la peau tannée, au souffle court,
Dont le ciel, toujours gris, semble demeurer sourd
Aux cris de leurs enfants entassés dans les niches !
Ô terre, nourris-tu les nantis et les gueux
Du même sein ? Mille fois non ! pardi! blâmable
Est ton partage mais, vois-tu, n'est condamnable
Que le riche à l'aspect horriblement rugueux.
Mohammed Zeïd
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►Peinture de Claudie avec son aimable autorisation◄
L'enfant à la poupée
Serrant contre son cœur sa poupée insensible
À sa douleur, l'enfant aux yeux d'obscurité
Laisse couler un pleur amer mal abrité
Sous ses cils flamboyant par un chagrin pénible.
Il est là, muet, sourd, abattu par un sort
Que ne peut supporter son âme encor fragile.
Pour quel mal est puni ce frais bourgeon d'argile ?
Non!, ! il est pur, si pur qu'il n'a commis de tort.
N'est point humain qui voit larmoyer un tel ange
Sans s'affecter ! Ô vie, as-tu plongé ta dent
De venin dans sa chair, lui qui, sans confident
Autre que son joujou, paraît d'un air étrange ?
Pardon, Claudie, un vers, si scrupuleux soit-il,
Ne peut décrire au mieux ton Art car ta palette
Dépasse de très loin la boîte du poète ;
Serait-il possesseur d'un grand talent subtil.
Mohammed Zeïd
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