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Charles Baudelaire
Gustave Courbet , peintre français (1819 - 1877)
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Seigneur, que lisiez-vous, dans ce bouquin poudreux ?
L'humain, en l'univers, pensiez-vous, n'est que brume
Qui se perd quand se meut le rideau ténébreux
De la nuit sur les fleurs dont l'air froid se parfume.
Horreur, était la vie à vos yeux semblant creux
Face au spleen où quêtait l'extase votre plume
Qui se vidait de ses ennuis en pleurs fiévreux
S'écoulant tels des rus d'épaisse et sombre spume.
Ô Courbet, ces objets : livres, table, encrier
Sont à bénir, oui, mais que vaut un baudrier
Sans la main d'un escrimeur à l'âme héroïque ?
Ne fut-il pas un saint pour soi-même, un martyr
De l'Art, sur un champ où nul ne put le cotir ?
Ô douleur, connais-tu poète aussi stoïque ?
Mohammed Zeïd
Flormed
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Le jeune mendiant
Bartolomé Esteban Murillo, peintre espagnol, ( 1617-1682)
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Il est là, seul, montrant ses pieds nus et terreux,
Las de fouler le sol ingrat qui le vit naître.
Mais voyez-le, dans ses haillons de miséreux
Où fourmillent les poux que ses ongles lépreux
Écrasent sans arrêt au jour qu'une fenêtre
Projette vainement sous ses yeux ténébreux.
Une pomme pourrie et des bouts de crevettes
Pour sa mordante faim, l'eau trouble d'un cruchon
Pour sa cuisante soif et vont ses nuits, muettes
Tels des caveaux enclos par de tristes murettes.
Ô pauvreté, son teint que tu rends pâlichon
N'ôte rien aux reflets de ses fraîches pommettes.
Son couffin, jamais plein, gît, près de lui, béant
Sur l'âpreté des cœurs regorgeant d'inclémence.
Nul n'allonge la main pour tirer du néant
Ce marmiteux moutard qui, le cas échéant,
Pourrait s'épanouir sous un ciel où Malchance
Est bannie, où le bien est le seul choix séant.
Ô Murillo, Séville, à la richesse agraire
Reconnue, avait-elle, à son sort, délaissé
Ce garçon démuni, tel un serin aptère,
Sans nid, dépaysé, sur un mont funéraire,
Espérant qu'un vent fou, d'un souffle cadencé,
Advienne, un soir brumeux, son ramage soustraire ?
Mohammed Zeïd
Flormed
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La bergère
Julien Dupré, peintre français, (1851 -1910.)
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-«Voici venu le soir, rentrons !» dit la bergère
A son troupeau comblé de verdure au pâtis.
Sur le sentier menant de la plaine herbagère
Au bercail, la pastoure exhibe un plumetis
Laissant paraître un cou de sylphide sans ailes
Fixant de son regard les beaux yeux des agnelles
Qui semblent admirer cet ange au féminin
Dont un palais royal aurait fait une rose
Égayant de son rire un lit d'alcôve rose
Où tout chantre perdrait son verset léonin...
Un pasteur, ô Dupré, suit de très près ses bêtes ;
Et, là, vous nous montrez la fille devançant
Ses brebis, sans bâton ni chien, les lèvres prêtes
À bruire un chant gai dans le vent caressant
Tout en offrant au sombre ciel son élégance
Dont la nuit vient cacher les appas et la ganse.
Ô peintre pastoral, votre art, si grand, mérite
Mieux qu'un poème aux vers de mesquine valeur
Griffonnés sans entrain par un humble rimeur
Errant dans un désert, reclus tel un ermite.
Mohammed Zeïd
Flormed
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Le naufrage
• Artiste:Claude Joseph Vernet (1714- 1789)
peintre, dessinateur et graveur français,
célèbre pour ses marines.
Sous un ciel tout de noir vêtu
Déchiré par des feux jaillis de la Géhenne,
La mer, qu'un vent rageur, têtu
Cingle sans fin, contient ses vagues avec peine.
Le bateau se laisse engloutir
Après avoir cédé sa voile à l'effroyable
Trombe voulant anéantir
La vie en cet endroit devenu pitoyable.
Les pauvres marins, éjectés
Sur les rochers, ont l'air de diligents fantômes
Par la tempête suspectés
D'être des avortons de je ne sais quels gnomes.
On les voit se briser les reins
Pour sauver maints objets aussi lourds que futiles :
Des fûts et d'énormes écrins !
Ah! l'argent asservit les peuples mercantiles !
Ô Vernet, gloire à ton pinceau
À ton Art de créer, faisant que la palette,
Du sombre, tire un clair faisceau
Irisant les clins d'œil que fait chaque tablette.
Mohammed Zeïd
Flormed
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Alphonse de Lamartine
♦ Artiste : Henri Decaisne (1799 - 1852)
Ô chantre de l'amour, ton heureux lévrier
Du regard te fixant, cherchait-il en ton âme,
Pour y goûter, le pur, le céleste dictame
Dont tu daignais remplir ton auguste encrier ?
Ta plume fit reluire, au fil de ta pensée,
L'horizon bleu des vers admirés par Victor
Qui déclama tes mots de sa voix de stentor
Ravi qu'il fut par leur beauté bien cadencée.
L'autre limier, flairant dans le vent la senteur
De l'encens que fleurait ton étoffe royale,
Espérait, queue en l'air, de ta paume loyale,
Une longue caresse, une tape en douceur.
Ton bel accoutrement, digne de ta sveltesse,
Dut astreindre le peintre à sortir tout son art
Pour accorder la vie à ce fruste savart
Qui, du coup, par ta grâce, oublia sa tristesse.
Le ciel, si gris soit-il, point ne put obscurcir
Le recueil où "Le lac", en effleurant ses rives,
Parlait à la forêt, aux jardins et leurs grives,
Aux monts bravant le temps n'osant les amincir.
J'applaudis en rythmant : gloire à Henri Decaine,
À son pinceau doré qui nous permit de voir
Le maître de la lyre ayant, son bon savoir,
Légué, sans rien celer, à toute âme sereine.
Mohammed Zeïd
Flormed
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