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Paix et Justice
Laurent de La Hyre
peintre et graveur français du XVIIe siècle
(1606-1656)
Des arbres, des agneaux, paysage anodin!
Un ciel vêtu de gris, du bois, une fontaine,
Tout près, deux fleurs en croix échangeant leur haleine
En un baiser dont rêverait un vieux mondain
Qui sentirait bouillir la sève dans sa veine
Qui sont ces deux beautés? Leurs attributs sont clairs:
Celle avec la balance a pour prénom Justice
Détournez vos gros yeux de la pierre qui pisse
Et fixez cette main offrant l'outil aux airs
Pour vous ordonner de peser sans caprice
L'autre exhibant un sein, bourgeon à peine éclos
C'est Paix. Son armure est à ses pieds. Plus de guerre!
Seul l'hymne de la vie est à chanter sur terre
Fini, fini le temps des nocifs mégalos
Bannissons les conflits, épurons l'atmosphère.
Le peintre a su parer de clarté ces joyaux
Que l'on a trop souillés pour dominer le monde
On a truqué les poids sous le désir immonde
D'amasser l'écu d'or et s'emplir les boyaux
Oubliant que la mort poursuit toujours sa ronde
Et partout où l'on va, gronde l'acier mortel
Nature en feu, cités et bourgs, murs en décombres
L'enfant et le vieillard traînent telles des ombres
Mourant de faim, de soif, de peur... Plus de cheptel
Ni de pâtis...arpents hideusement sombres.
M.Zeid
121019
Bjnb
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Clio la muse
Pierre Mignard
peintre français.
(1612 - 1695)
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Ô Clio, la jolie ! un peintre au pinceau d'or
Dut montrer tes appas telle une libertine.
Es-tu fille de Zeus, âme de Mnémosyne,
Ou n'es-tu que le fruit de l'esprit d'un cador
De l'art minutieux qui jamais ne badine?
On dit que tu chantais, des héros, les exploits
D'où ton seul attribut de muse de l'histoire.
Ce n'est, pour ta beauté, qu'un mot diffamatoire
Car c'est claquemurer ta grâce en des endroits
Où resplendit le fard qui trompe l'auditoire.
Ces livres si massifs content-ils Vérité?
J'en doute! Ils sont farcis d'illusoires louanges
Encensant les payeurs figurés tels des anges
Même s'ils sont démons bourrés de vanité.
J'aurais aimé te voir loin de ces dits étranges.
Mais Homère et ses pairs ont ainsi décidé.
Nous marchons sur leur pas, et leur imaginaire
Demeure florissant dans notre abécédaire
Même si le soupçon, de nos jours, l'a vidé
De ses bas racontars indignes de notre ère.
Vaine est la passion qui n'use du tamis
Pour, le son, enlever. Si j'étais quelqu'un d'autre,
Je vous aurais sommés de préférer l'épeautre
Au blé dur. Votre pain serait bon, les amis!
J'en fais alors le mien, prenez-en pour le vôtre !
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Village en Kabylie
Waldemar Todé
peintre suédois
(1859- 1900)
Ô Waldemar, la maladie avait conduit
Tes pas et ton pinceau vers la terre kabyle
Et ses affables gens. Là, coloriste habile,
Du panier de ton art, tu sortis ce beau fruit.
Le toit vieux, le sol nu, la verdure timide,
Les poules remuant le sable sec, en vain!
Le silence absolu...Faut-il être devin
Pour déchiffrer l'état de cet endroit aride ?
Et pourtant, en ces lieux, reclus, ont vu le jour
Poètes et sorciers à la voix éternelle.
Le gilbab, le haïk, le burnous, la gonelle,
En ces coins, ont vécu dans le calme et l'amour.
Les monts des environs vous diront sans ambages
Que le trésor n'est pas en cailloux à valeurs
Mais en bonté logée au tréfonds de ces cœurs,
Heureux malgré la rareté des frais ombrages.
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Pastourelle
William Bouguereau
peintre français
(1825 - 1905).***
Voyant que l'agnelet ne peut fouler la sente
De ses sabots moelleux, la bergère le prend
Dans ces amènes bras . L'amour est inhérent
À son cœur naturel, à son âme clémente.
La brebis, l'œil ouvert, la suit d'un pas léger.
La fille lui sourit:« Je ne vais l'égorger!
Je le choie et tu vois sa frissonnante laine
Bien collée à son sein et les doigts en fuseau!»
Chemin faisant, la mère allonge le museau
Vers son bébé chétif pour flairer son haleine.
Ce petit bout d'ovin, dans son ventre a mûri.
Il boira de son lait, ce bel agneau chéri.
Câline est la maman, tendre est la pastourelle!
Un tableau bien vivant où le peintre a sorti
Tout son doigté: du cher bijou très bien serti
Émane un rai serein qui reluit sur la belle
Mine de l'angelot se mouvant dans le noir.
On dirait, dans la nuit, un magique miroir.
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Pèlerinage à l’île de Cythère.
Jean-Antoine Watteau
peintre français
(1684-1721)
La fleur de mer Égée, île où dut voir le jour
Au miroir des halos de son azur de rêve,
Lui servant de couffin dégoulinant de sève,
La belle enfant de Zeus, déesse de l'Amour.
Ô Cythère, est-ce là sur tes flots vert de jade
Que naquit Aphrodite aux appas enchanteurs
Guirlandes et carquois, gais sourires charmeurs,
Vérité non fardée ou simple galéjade ?
Et ces gens qui s'en vont se recueillir auprès
De ta statue, ont-ils trouvé la clef à même
D'ouvrir le cœur fermé, silencieux, qui n'aime
Partager son bonheur, morne tel un cyprès ?
Le peintre, semble-t-il, a posé sur sa toile
Avec art, c'est certain, tout un monde amoureux.
À leurs habits, on les dirait des bienheureux
Venus passer la nuit, à voir briller l'étoile.
Leur étoile chérie, au pied de son prunier,
Étant de roc, ne peut ni leur parler ni luire
À leurs yeux l'implorant, pieusement, d'enduire
Leurs âmes d'appétit, d'en remplir leur panier.
Voyez leurs tristes fronts ! Fin du pèlerinage !
Ils n'ont rien récolté. Peine perdue ! On prend
La pente du retour, bredouille. Un révérend
Fakir dit qu'un poisson, hors de l'étang, ne nage.
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