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Jean-Baptiste Corot
peintre et graveur français
(1796-1875)
Le fils du roi de Thrace et de la muse au front
Ceint de lauriers, Orphée, endeuillé par la perte
D'Eurydice, voulut, des enfers, vous diront
Les grecs, la ramener, même de feux couverte.
Il s'engouffra, lyre à la main et cœur vaillant.
Indulgent fut Hadès. Il lui permit d'extraire
Du schéol son aimée. Il sortit en graillant
Un chant d'amour. Corot a bien su les portraire.
On l'avait intimé de fuir sans adresser
Nul regard à la femme obligée à le suivre.
Les voilà près du Styx, dans un sous-bois fumeux !
Dans cet étrange endroit peuplé d'êtres squameux,
Il eut un désir fou de jeter un œil ivre
Vers elle, il ne fallait l'oukase transgresser.
Mohammed ZEÏD
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L'ardent soleil de thermidor
L'ardent soleil de thermidor prématuré
Répand sur le village une trombe de flammes.
On entend grésiller le chemin torturé
Par les reflets du ciel ankylosant les âmes.
Pas un oiseau n'ose voler. Du bois muet
S'exhale en tourbillons un relent de fournaise.
La rivière se tait .On voit son cours fluet
Serpenter, mort de soif, sur un tapis de glaise.
Faute de monnaie, on est sourd à l'appel
De la mer. Pour un gueux, avaler du napel
Serait moins douloureux que s'enfuir dans la plage.
On subit la chaleur et ses calamités.
En espérant l'hiver aux sombres nudités
Qui viendra démonter ces gens de tout pelage.
Mohammed ZEÏD
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Il portait les armes.
Hors de son coin natal, sous un autre drapeau,
Un jeune aux cheveux bruns, vif smâli* téméraire
Criait : «Vive la paix», quitte à laiser sa peau.
Il ne regrettait point sa tente et son araire.
L'été battait son plein et les chars ennemis,
Dégobillant la mort, élimaient leurs chenilles.
Loin des yeux somnolents des illustres commis
De l'État, les soldats honoraient leurs guenilles.
L'homme venu d'ailleurs fut gravement blessé.
On le rendit au bled, laissant là-bas trois côtes.
Il vécut miséreux, infirme et délaissé.
Son livret* a jauni tel un carnet de notes,
Chez son fils -né deux ans après le grand conflit-
Que tout bruit de canon, d'épouvante, remplit.
Mohammed ZEÏD
mon père
*smâli : de la tribu des smâla, guerriers de la région d'Oued-zem.
*livret militaire délivré à Reims
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La laitière regardant sa vache.
Peinture de Julien Dupré,
peintre français, (1851 -1910.)
Ô berceau de Dupré, terre de Picardie,
Du ciel ocré descend la nuit qui vient couvrir
Tes pâtis d'où revient la manante enhardie
Portant à bras et joug le lait que le zéphyr
Parfume et rafraîchit. La princesse champêtre
Fixe d'un regard doux la vache en train de paître :
«Ton pis, fort généreux, lui dit-elle, crois-moi,
Vaut pour nous un trésor qui mettrait en émoi
Plus d'une vicomtesse et plus d'une marquise.»
Et d'un pas souverain, la belle au teint cuivré
Va, son cou gracieux, au vent du soir, livré
Une nymphe, une fée, à la peinture acquise
Béni sois-tu, seigneur ; béni soit ton pinceau !
Grâce à ton art, dut resplendir la vie agreste
Aux yeux de l'univers car de chaque monceau
De verdure jaillit la beauté de ton geste
De génie adorant le grand air et la paix
Dont tu savais signifier tous les aspects.
Les picards, à ce jour, font valoir la noblesse
De ton style élevé dicté par la simplesse
De ce vaste jardin que tu sus embellir
Par les saphirs brillants de ta riche palette
Tel ce bijou humain sans madras ni voilette
Qui pourrait, de vertu, tout un couvent remplir.
Mohammed ZEÏD
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